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 Sous la terre, rien ne va plus

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MessageSujet: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptyDim 22 Avr - 20:21

Marchant dans les souterrains accompagnée de gardes mérisiens, mais aussi de ses propres hommes ondaliens, l'Intendante s'avançait calmement, observant partout autour d'elle. Elle s'était autour du cou un foulard, pour le remonter sur sa bouche et son nez, car l'air était irrespirable sous la terre. Parfois, de la poussière dégringolait du plafond, comme si celui-ci menaçait de s'effondrer. Un caillou de terre vint s'éclater délicatement sur l'épaule de l'ondalienne, et elle fronça les sourcils en grimaçant. Elle demanda à son serviteur de lui donner sa gourde, et retira son foulard pour s'en appliquer un peu sur le visage, et en boire aussi. Elle était si loin des eaux, qu'elle s'en sentait mal. Dans ces grottes, l'atmosphère était étouffante. Se rendre dans ses endroits, pouvait aider à comprendre le caractère si violent de ses rustres. Ils devaient en devenir fous. En plus, comme celles-ci étaient à la taille des Mérisiens, Elenia devait courber le dos avec souplesse pour pouvoir avancer.

Elle avait entamé son voyage diplomatique, il y a de ça une semaine. Elle avait pris l'initiative d'aller demander des alliances commerciales avec les Merisiens. Le périple avait été long et épuisant, mais elle devait encore redoubler d'effort pour convaincre le patriarche de conclure des affaires avec les Ondaliens. Elle avait ramené beaucoup de cadeaux d'ailleurs pour celui-ci, et elle espérait qu'il en serait satisfait. Des alcools les plus fins, et aussi les plus forts d'Ekëstrim, Ensuite, des lingots d'acier, du meilleur acier de la capitale. Enfin, il y avait quelques spécialités des Ondaliens, qu'elle offrirait si le moment lui serait opportun.

Quoiqu'il en soit, ce voyage valut le détour, quand elle arriva devant la porte du trône du Patriarche. Ses yeux s'écarquillèrent progressivement, en voyant ses émeraudes brillants incrustés dans la porte. Certes les Mérisiens étaient réputés pour leur barbarie et leur peu de civilisation, mais on ne pouvait pas leur reprocher leur manque de savoir-faire en matière de joaillerie. Cette porte scintillante et majestueuses, aux yeux d'une femme cupide telle que l'Intendante, envahissait celle-ci d'admiration pour ce peuple qu'elle avait peut-être jugé trop rapidement. Son orgueil lui jouait des tours, et cette porte était pour elle un rappel, de ne pas sous-estimer trop vite ceux qui n'étaient pas de sa race. Par contre, quand elle voulut s'approcher pour toucher les pierres, les gardes mérisiens, qui lui arrivaient à la taille, barrèrent la trajectoire de sa main avec leurs lances. Elle recula vivement, et s'excusa, un peu agacée tout de même.

Elle pénétra enfin dans la salle, toute aussi majestueuse que ce qu'annonçait la porte d'entrée. Elle s'avança avec ses hommes, qui la suivaient toujours avec les bagages de l'Intendante, tandis que celle-ci suivait docilement les petits gardes. Elle se rappelait la première fois où elle avait vu un mérisien dans la capitale. Son père était le Conseil, il recevait donc régulièrement d'autres races qu'il invitait dans la demeure familiale. Elle se rappelait tant elle avait ri ce jour-là. Mais elle était jeune, et ne savait pas se maîtriser. C'est avec le temps qu'elle avait fini par trouver ça normal, et elle avait accepté la différence. En même temps, elle ne pouvait pas se permettre ce genre d'écart, surtout à son rang.


Elle s'approcha du trône où était avachi le patriarche, et tira une gracieuse révérence, ce qui fit un plus grand bien à son dos complètement tordu depuis qu'elle était arrivée Vënmher. Elle observait le tapis, le beau tapis qui contrastait avec les cavités terreuses qu'elle avait visité, et elle fit dans cette position :
Même si vous devez sûrement savoir qui je suis, je me permets de me présenter. Je suis Elenia Tannïr, Intendante du royaume des Ondaliens, Ekëstrim.


Elle se redressa, enfin, elle recourba le dos comme elle le pouvait. S'en suivit alors les nombreuses formes de politesse qu'elle était contrainte de faire :

Patriarche Arthrond, je suis tant honorée de rencontrer celui qui mène avec force et bravoure les Mérisiens. Mon voyage fut long pour me présenter ainsi, humblement devant vous. Veuillez tout d'abord, acceptez les cadeaux, au nom de la Souveraine et de tout le peuple Ondalien,que je suis chargée de vous remettre.

Elle fit signe à ses hommes d'amener la première boite. Elle avait répété cette scène plusieurs fois, pour que les gardes ne se trompe pas. Des bruits de bouteilles se cognant mirent sûrement la puce à l'oreille du patriarche, sur le premier cadeau de l'Intendante. Le servant arriva avec un pied de biche, et ouvrit la cargaison devant Vuzlin. Elle lui esquissa un sourire poli et aimable, et attrapa une bouteille en la montrant au patriarche :

Voici une vingtaine de bouteilles d'alcool forts, les meilleurs qu'ils soient à la cité des Eaux.

Elle replaça la bouteille au liquide orangé, et les gardes refermèrent la boîte, afin de poser un lingot d'acier sur le couvercle. Elle le présenta alors en disant :

Voici une dizaine de lingots d'acier, un mélange subtil et indestructible des minerais de nos terres, mais aussi des abysses de nos océans d'Ekëstrim. Ces minerais se sont solidifiés dans l'eau, et vous savez comme moi que l'eau est pourtant quelque chose de redoutable, car même les plus grandes falaises n'y résistent pas avec le temps. J'espère que vous serez satisfaits de ces modestes cadeaux, qui font acte de la générosité de la Souveraine, et qui prouve aussi nos intentions de paix avec vous, digne représentant du peuple des Mérisiens.

Elle observa ses gardes, et hocha la tête négativement, pour leur dire d'attendre pour le dernier cadeau. [/b]Elle voulait d'abord laisser le temps au patriarche de réagir, car il était resté silencieux assez longtemps.
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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptyLun 23 Avr - 21:20

Vuzlin regardait Elenia avec la plus grande attention. Une part de lui ne pouvait s'empêcher d'admirer sa beauté. Une beauté soigneusement entretenue, tout à la fois naturelle et artificielle. Il était visible que cette femme ne s'était pas contentée de l'accepter de la part d'une nature généreuse. Elle l'avait soigneusement travaillée et n'hésitait visiblement pas à s'en servir pour faire bonne impression. Toutefois, ses traits dénotaient une personne au tempérament de glace. Quand l'Ondalienne souriait, il ne pouvait s'empêcher de penser qu'il s'agissait bien là d'une marque de politesse à son égard et non d'une joie sincère. Ce qu'il avait lu sur elle était donc vrai. Il n'était bien sûr par resté les bras croisés quand il avait reçu à son retour de voyage l'annonce de son arrivée prochaine. Il avait exigé de ses hommes un maximum d'information sur l'Intendante et autant dire qu'il en aurait eu pour son argent s'il avait eu à payer. Elenia Tannïr était née dans une bonne famille, jouissait d'une réputation d'érudite et était parfois vue comme l'une des gestionnaires les plus avisées depuis bien des années. Mais tout cela n'était bien sûr que la partie émergée de l'iceberg, ce qu'on aurait pu lire dans une biographie autorisée et que personne n'avait intérêt à contester en public. Par chance, les informateurs de Vuzlin ne se contentaient jamais d'ouvrir les livres tirés de la bibliographie officielle. Ils ne répugnaient à rien, même pas à lire les pamphlets les plus diffamatoires. La plupart étaient de l'ancienne école, coupant et recoupant les sources, de façon à ne jamais laisser une seule version de l'histoire obscurcir la vérité. Ces hommes, on ne les voyait jamais. Lui-même ne connaissait que le jeune Merisien, de quelques cycles son cadet, qui venait lui porter les rapports de l'unité du renseignement et niait en faire partie - même si Vuzlin n'était pas dupe. Quoiqu'il en soit, ils lui avaient fourni bien plus intéressant que les mêmes poncifs répétés partout au sujet d'Elenia. Il savait à présent qu'elle traînait avec elle la solide - mais peu enviable - réputation de rabat-joie mais que de gens entreprenants louaient son esprit pragmatique. En d'autres termes, l'Intendante ne rechignait pas aux pots-de-vins et aux ententes illégales. En soi, cela ne prêtait pas vraiment à conséquence. Vuzlin savait que les Ondaliens prisaient fort les intrigues et rivalisaient de malhonnêteté, dans la limite du raisonnable. Ce qui était surprenant, c'était que la veuve jouait de sa réputation de femme aigrie et aisément irritable pour couvrir sa forte propension à l'argent facile et mal acquis, plutôt que d'assumer publiquement son penchant, somme toute assez compréhensible de la part d'une Ondalienne, pour la cupidité. C'était très malin de sa part. Elle passait pour une inflexible aux yeux de tous et empochait en secret le prix de sa complicité et de ses silences. Autant dire que si elle comptait marchander, ils en auraient pour longtemps.

Dame Tannïr, dit-il, rompant ainsi le silence, quel plaisir de vous rencontrer enfin. Avant de continuer avec ces politesses, ne désirez-vous pas prendre un siège. Sachant qu'une sommité d'Ekëstrim venait en ce lieu, j'ai immédiatement ordonné à mes meilleurs artisans de vous fabriquer un siège apte à contenir votre séant. J'ai bien peur que nos fauteuils de petites gens ne puissent remplir cet office.

Se faisant, il désigna du doigt deux de ses sujets qui sortirent d'un coin d'ombre, comme par enchantement, portant un lourd siège de pierre. Il pouvait sembler inconfortable à première vue mais il avait été traité par magie, de façon à offrir à celui qui s'y assiérait un confort qui soit tout sauf spartiate. En effet, lorsque l'Intendante délaisserait la station bipède, la roche se déformerait de manière idéale, permettant au dos de ne pas se tasser et au postérieur de ne pas souffrir de la dureté du matériau. Un chef d’œuvre, en somme. Les porteurs le déposèrent en face de lui avec plus de délicatesse que ne semblait le permettre une telle masse. Puis les deux servants s'inclinèrent devant lui et filèrent aussi discrètement qu'ils étaient arrivés. Le Patriarche fit un geste à son invitée et la regarda s'asseoir, toujours avec une dignité surnaturelle. Lui arrivait-il seulement jamais de se détendre ? Il espéra en son for intérieur que l'attention portée à la confection de ce siège la mettrait dans de bonnes dispositions. Et puis, il y avait le cadeau. S'il avait insisté pour fabriquer lui-même ce dernier, c'était moins parce que la tradition l'y avait incité que parce qu'il ne faisait confiance à personne d'autre qu'à lui-même pour la création d'un bien qui pourrait servir à entériner un accord entre Ondaliens et Merisiens. Il était le Patriarche, tel était son devoir.

Vos cadeaux sont somptueux, madame l'Intendante, reprit-il une fois que cette dernière se fut confortablement installée, ils font honneur à mon peuple, et au vôtre pour les avoir fait porter. Pour ce qui est du minerai, on dit bien souvent qu'il règne dans le giron de notre mère la Terre des pressions égales à celle que l'on rencontre au plus profond des océans. J'y vois là un présage, et un signe que l'amitié peut grandir entre nous, et nous apporter mutuellement des bénéfices substantiels. Quant à l'alcool, j'ignore si vous souhaitez m'enivrer pour négocier en des termes vous favorisant mais je ne vous outragerai certainement pas en les buvant comme du petit lait. Les nectars de l'étranger, qu'ils vous réchauffent ou non le ventre, sont faits pour être appréciés et consommés en bonne compagnie. Ce qui tombe bien puisque vous êtes-là. Si nous parvenons à un compromis, je me ferais un plaisir de prendre quelques gorgées de cet heureux présent. Mais avant que nous n'entrions dans le vif du sujet, j'ai moi aussi quelques petites choses à vous donner. Il ne sera pas dit que Vuzlin Arthrond n'a pas honoré une invitée comme il se doit.

Il héla un jeune Merisien qui se trouvait à moitié dissimulé par un pan d'ombre et lui demanda d'apporter ce qu'il avait fait préparer. Le jeune homme disparut dans les ténèbres nimbées de vert luminescent et en ressortit en un temps si court qu'on aurait dit que ces dernières l'avaient avalé puis recraché. Il tenait dans ses mains un paquet enveloppé par un tissu léger et le déposa délicatement entre les mains de l'Ondalienne. Vuzlin sourit alors qu'elle dégageait le contenu de son enveloppe. A l'intérieur se trouvait des bijoux ouvragés dans l'or le plus fin qu'offrait la terre de Vënmher. Il y avait un pectoral, pas précisément le genre de chose que l'on porte en permanence, mais l'indispensable ornement des individus de haut lignage en temps de célébrations religieuses. Il pouvait être indifféremment porté par un homme ou par une femme. Il s'agissait sans doute de la pièce la plus modeste, se contentant d'arborer un magnifique saphir d'une taille que personne n'aurait qualifié d'indigne. Le collier, c'était tout autre choses. Il était non seulement serti d'un saphir, lui aussi, mais d'une alternance de petites émeraudes et de pierres de moindre valeur, mais toutes de couleur bleue. L'ensemble avait la particularité de sembler tout à la fois extravagant et sobre, selon la façon qu'on avait de le voir. Enfin, le dernier présent était une arme. Pas une épée ou une hache, non, mais une dague telle qu'en portait les voleurs et les assassins. Mais à la différence des armes de ruffian, celle-ci avait été forgée à partir d'un métal que l'on ne pouvait trouver qu'à condition de quitter la relative sécurité de Vënmher pour les royaumes inhabités des grandes profondeurs, dont bien peu revenaient. Ce n'était pas l'objet le plus éclatant pour la vue mais on pouvait sentir la puissance qu'il dégageait rien qu'en le prenant en main. Le matériau dont il était fait ne cassait pas, et perçait sans soucis les armures les plus coriaces. Et de ce fait, c'était sans aucun doute le plus précieux de ses trois objets.

Voilà donc pour vous, noble dame. J'espère que ces présents vous combleront, et ce d'autant plus que j'ai moi-même travaillé les matériaux qui les composent afin de parvenir ce résultat. Le pectoral est par chez nous une distinction prisée, un symbole d'opulence que l'on n'enfile que lorsque vient l'heure d'honorer Vënker, notre dieu tutélaire. Le collier est pour votre agrément et il n'y a sans doute pas en ce pays de femme qui porte de parure plus sublime qu'elle, tant par son ouvrage que par le choix des matières le constituant. Quoiqu'il me semble avoir vu quelque pompeux nobliau se promener avec des joyaux bien plus indécents. En Vënmher, le prix de la vanité revient sans conteste à la gent masculine, je le confesse volontiers. Quant à la dague, vous apprendrez que bien peu de nos soldats peuvent se vanter d'en porter une plus rare, ni plus efficace. Elle vous protégera des malandrins et percera aisément toutes les protections. Prenez garde toutefois à ne point vous blesser, vous ne ressentirez jamais le besoin de l'aiguiser.

Il se tut. Il s'était surpassé cette fois. Toutes ses heures passées aux côtés de grands joaillers pour la fabrication des bijoux, à recevoir leur conseil ainsi que celles passées à s'échiner sur ce métal inflexible qui se refusait à prendre la forme d'une lame, il ne les regrettait pas. Il était rare qu'on offre pour une simple entrevue autant de cadeaux d'aussi bonne qualité mais c'était son premier contact avec la nation de l'eau et il voulait faire bonne impression. Il escomptait qu'Elenia, en femme connaissant - et appréciant - la valeur de l'argent, saisirait la portée de ces dons. Plus qu'un accord, c'était la paix qu'il comptait renforcer entre leurs peuples. Et pour cela, il était prêt à toutes les folies, si tant est qu'elle pouvait avantager son peuple à la fin.
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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptyVen 27 Avr - 1:08

L'ondalienne suivit du regard deux servants, sortis de nulle part, qui portèrent un lourd siège de pierre jusqu'à elle. Elle fut étonnée de voir la force des mérisiens en œuvre, car les ondaliens auraient dû être au moins une dizaine pour porter une telle masse. Néanmoins, elle regardait ce siège d'un mauvais œil, et quelque peu sceptique. Entre rester le dos courbé, et avoir les fesses gelées sur de la pierre solide, elle préférait encore développer sa souplesse. Mais elle s'efforça de sourire et de remercier le patriarche de cette attention. Quand elle s'assit enfin, ce fut une toute autre réaction et sensation qui s'en découla. Elle haussa les sourcils, légèrement étonnée, et se redressa un peu pour se rendre compte progressivement de l'ingéniosité de cette chaise des plus royales. Elle esquissa alors un sourire satisfait à Vuzlin, tout en restant dans une position humble. Elle ne s'y vautrait pas, car elle voulait toujours faire bonne impression. Elle était toute droite, les mains appuyées sur ses cuisses, et elle observait les différentes scènes qui s'offraient à elle.

Et quel délectable, et enrichissant spectacle. Enrichissant, non pas au sens spirituel, il ne fallait jamais l'entendre de cette manière avec Elenia. Après que la patriarche l'ait remerciée avec mille éloges. Elle se mit à rire doucement quand celui-ci fit une touche d'humour sur l'alcool qu'elle lui avait offert. Le mot qui la fit frémir un instant, fut ce terrible mot « compromis ». Cette simple idée la répugnait. Elle avait toujours eu la maîtrise de tout, et il était de notoriété publique qu'elle était une femme intransigeante. Elle déglutit et fit passer sa gêne par un sourire d'abord crispé, puis ensuite des plus gracieux, la tête légèrement basculée en arrière. Mais ses poings se crispant un instant montrèrent sa fugace nervosité face à ce terme employé. Le chef des Mérisiens n'avait peut-être pas remarqué ce futile changement de comportement, tant il était absorbé par son discours.

Contrairement aux préjugés qui faisaient rages entre chaque peuple, l'Intendante se rendit compte que les Mérisiens n'étaient pas aussi primitifs qu'on le prétendait. Elle se laissait surprendre par les talents magiques et artisanales, et par l'éloquence du Patriarche, qui ne semblait pas rustre ou violent à première vue. Une surprise encore plus agréable se glissa dans les derniers mots de son interlocuteur. En effet, elle ne s'était pas du tout attendue, en venant à Venhmër, d'être agrémentée de quelques présents. Et ils n'étaient pas au nom du peuple Ondalien, mais bien à titre personnel, ce qui toucha encore plus l'Intendante. Évidemment, elle savait que ce n'était que pour l'amadouer, ou du moins elle le croyait de part sa méfiance habituelle. Mais si tel était sa réelle intention, alors on pouvait dire qu'il avait réussi, même si la jeune femme ne voulait pas se l'avouer.

Il lui tendit un paquet, et elle ne se fit pas attendre pour l'ouvrir. Elle écarquilla les yeux, en voyant la beauté et la richesse de ce qu'elle avait entre les mains. Alors les mérisiens étaient sûrement les meilleurs joailliers de tout Elirondia, et l'Intendante savait déjà qu'elle en avertirait sa souveraine. Elle posait délicatement son index sur les différentes pierres précieuses, comme pour compenser ce qu'elle n'avait pas pu toucher sur la porte principale de la salle du trône. A peine avait-elle le temps de se remettre de ce magnifique présent, qu'il lui en apportait encore un autre. Elle fit glisser l'arme du fourreau, et observa celle-ci avec admiration, qu'elle ne pouvait plus cacher. Elle posa la lame sur le bout de ses doigts, comme pour scruter la matière et la beauté de celle-ci. Elle se rendit compte à ce moment à quel point elle aimait le luxe et l'argent. Enfin ce n'était pas une grande découverte, elle le savait déjà, mais là elle s'en convainquait vraiment. Il n'y avait rien de plus beau que ces pierres brillantes et reluisantes, enfermant la lumière comme un coffre protecteur et transparent. Comme si la lumière elle-même s'était solidifiée en cette matière précieuse. Elle n'avait pas arrêté de sourire, et cette fois-ci elle était vraiment sincère, face à tous ces présents.

Elle se redressa sur son siège toujours aussi confortable, et écouta attentivement le patriarche. A la fin de son discours des plus intéressants. Elle observa lentement la grande pièce plongée dans l'obscurité et mal éclairée, puis elle répondit alors humblement et solennellement :


Et bien, Patriarche, beaucoup de rumeurs courent sur la réputation violente et primitive de votre peuple, mais ici j'atteste et j'attesterai jusqu'à la fin de mes jours que ces rumeurs ne sont qu'une atteinte à votre noblesse et à votre civilité avancée. La tradition chez les ondaliens veut que l'invité apporte des présents pour remercier son hôte, mais l'hôte n'offre rien, si ce n'est son logis. Et vous, vous m'offrez ces cadeaux d'une valeur inestimable, que vous avez vous-même confectionné. Vos talents dépassent tout artiste de la cité des eaux. J'espère que mes présents sont toujours à la hauteur des vôtres. Vos présents sont la preuve de votre bonne foi et de vos efforts pour la paix entre nos peuples seront bien adressé à la Souveraine, qui n'entendra que du bien de vous. Quoi de mieux pour la paix, qu'une prospérité économique pour nos royaumes respectifs ?

Cette dernière question permettait d'amener subtilement le sujet à l'objet véritable de sa venue. Elle avait beaucoup à faire, et la tâche serait ardue. Car le patriarche semblait certes honnête et loyal, mais tout aussi intransigeant que l'Intendante. Néanmoins, elle espérait bien que les propositions qu'elle allait lui faire attiserait son attention. Elenia joignit ses mains, calme et semblant pleine de sang-froid, et observant de son siège le Patriarche barbu. Un sourire poli et aimable s'était figé sur son visage, mais celui-ci la quitterait bientôt pour un visage plus grave et déterminé. Quand il s'agissait des affaires, on ne rigolait pas.


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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptySam 28 Avr - 22:41

Vuzlin avait attentivement observé l'expression de l'Ondalienne alors qu'elle avait découvert ses présents, et même après. Pour une fois, il le savait, ses sourires et ses mimiques n'avaient nullement été factices. Il avait atteint l'Intendante en plein cœur - ou plutôt en plein porte-monnaie. Il était heureux que ses observateurs n'aient pas surestimé l'appétit d'Elenia pour les richesses. Ses sourires, son réajustement dans le siège, pour plus de confort à priori, ses regards à la dérobée qui avaient rapidement balayé le lieu, toutes ces petites choses trahissaient son contentement. Il avait été avisé de ne pas se servir d'elle comme d'une porteuse de colis. Il avait longtemps hésité à fabriquer des présents à destination de la Souveraine plutôt qu'à celle de son invitée mais s'était au final dit qu'un premier contact avec une personne qui avait toute la confiance de Dame Brost valait mieux qu'une cargaison de bijoux à destination de cette dernière. Et puis, Vënmher regorgeait d'artisans de renom. Il aurait tout le temps de noyer son homologue de l'eau sous une succession d'arrivage de bien précieux de natures diverses. Mieux valait s'attirer les bonnes grâces de l'Intendante. Elle tenait les cordons de la bourse de son pays et pouvait efficacement l'aider à ouvrir pour leur deux peuples les portes d'une nouvelle ère, une ère de confiance et d'échanges mutuellement satisfaisants. Un état de fait qui, s'il était entériné, lui permettrait d'asseoir un peu plus sa légitimité en tant que Patriarche - ce qui ferait peut-être taire les vieillards du Conseil - et à elle de toujours plus s'enrichir. Une levée de taxe, des comptes falsifiés et Elenia deviendrait la plus riche Intendante en trois siècles. En somme, chacun gagnait aux changes. Seulement, l'accord n'était pas encore passé. Il avait du travail.

La prospérité économique ? Mais très certainement, Dame Tannïr, répondit-il d'un ton entendu qui, tiré hors du contexte, aurait pu sembler enjôleur. "Vënmher ne désire rien tant que la paix." Tels furent les mots de Narvin Mörom, premier Patriarche né de la caste des forgerons, qui fut le premier d'entre eux à n'être ni un soldat ni un maître de magie. Il mourut assassiné... une bien rude époque. Quand nous autres, Merisiens, nous sommes installés en ces lieux, guidés par la bienveillance de Vënker, notre dieu tutélaire, nous n'avons pas cru en la paix. Le dieu nous avait mis en garde contre les appétits de domination qui avaient notamment poussé les Bannis dans l'impasse où depuis ils demeurent. Cependant, c'était bien contre nos propres appétits qu'il nous mettait en garde. Son message a été malheureusement dévoyé. Alors nous nous sommes armés et avons vécu en autarcie. De cette période, il reste beaucoup de séquelles. Elle explique pourquoi nos marchands, qui sont pourtant aujourd'hui partout présents en Elirondia, même dans les plus sinistres bouges de Thorgal, sont méprisés par les castes prétendument supérieures.

Il ricana, laissant transpirer son mépris pour une élite qui jamais n'aurait penser le voir accéder au poste suprême. Il leur avait donné tort et à présent chefs de troupes et mages renommés lui mangeaient dans la main.

Et le plus triste dans tout ça, Dame Tannïr, c'est que nous avons toujours redouté l'extérieur. Nous avons fait de Vënmher, ce paradis sous terre, une prison pour notre peuple. Alors que nous avions amplement les moyens d'importer les richesses de la surface contre notre artisanat, qui est après tout magnifié dans les imaginaires de chaque peuple. Nous aurions eu la belle vie. Et au lieu de ça, quoi ? On a remisé dans la Ville Basse ceux qui monnayaient nos chefs-d’œuvre contre ceux que nous ne pouvions pas avoir autrement. Comme s'il était honteux de s'entendre en affaires avec les étrangers. Alors, bien sûr, ça s'est progressivement arrangé. On a commencé à commercer sans retenue mais notre paranoïa s'est-elle calmée ? Que nenni !

Il sourit intérieurement rien qu'en anticipant l'anecdote qu'il allait raconter. Une histoire à ce point honteuse qu'elle avait été popularisée sous forme de chansons salaces qui résonnaient dans la Ville Basse et l'Autre Cité les soirs de beuverie. Il se demanda si cela allait choquer l'Intendante mais après tout, cela importait-il ? Il savait que, pour une part, l'attitude glaciale de l'Ondalienne était calculée. Elle était sérieuse, mais sûrement pas prude.

Le sommet du ridicule fut atteint quand Murin Dolgir, Patriarche issu de la caste des maîtres de magie déclencha la guerre contre votre peuple. Les relations furent rompues et, depuis, les échanges se font de façon bien désordonnée, favorisant le marché noir et la contrebande. Voulez-vous savoir pourquoi il sortit de son râtelier une hache poussiéreuse qu'il n'avait sans doute jamais empoignée ? Pour une histoire de coucherie ! Lui disait qu'un ambassadeur d'Ekëstrim avait violé sa femme, Ulfane, ironiquement surnommé la Fidèle. En vérité, Dolgir était un tel laideron - que l'on soupçonnait d'être aussi ardent qu'un grabataire - que sa femme ne pouvait souffrir de le toucher et qu'elle s'était rabattue sur le bel étranger. Pas question pour le pauvre impuissant d'assumer ses cornes. C'est ainsi que, pour le prix de sa fierté mal placée, il ruina les entreprises patientes de ses prédécesseurs qui avaient consolidé avec difficulté les liens entre nos deux nations, qui ne sont pas coutumiers d'une entente amicale, pour de sombres raisons culturelles. Il fut tué au champ de bataille par un général adverse de l'époque, avant même d'avoir pu seulement dévisager la Souveraine. Il faut dire qu'on l'avait accusé d'avoir graissé la patte de ceux qui désignent le Patriarche et qu'il était incapable de lancer un sort correct. On dit même que la Pierre ne l'a jamais reconnu. Une affaire lamentable. Et bien des cycles après, je tente de réparer les pots cassés.

Il avait resitué le contexte, de façon à montrer qu'il n'était pas un Patriarche aussi inexpérimenté que la fraîcheur de son règne le laissait présumer. Il avait à cœur de toujours se tenir renseigné et espérait continuer d'apparaître aux yeux d'Elenia comme un individu compétent. Son dernier désir était de passer pour un fat et un ignorant. Et après tout, les relations entre Ondaliens et Merisiens avaient toujours été tendues, ce n'était un secret pour personne. Un proverbe merisien disait : "Ne tourne jamais le dos à un Ondalien car il te détroussera avant même que de te poignarder." Leurs dieux eux-mêmes n'étaient pas en bonne entente. Face à ce lourd passif, il était bon de sous-entendre qu'il avait l'intention de faire table rase du passé, même s'il ne doutait pas que l'Intendante se moque bien des préjugés de son peuple sur le sien du moment qu'elle gagnait à l'affaire de quoi se remplir un peu plus les poches. Cependant, derrière l'Intendante, il y avait la Souveraine. Et elle, pour le coup, ne serait pas insensible à ce discours. Il espéra que son invitée comprendrait l'implicite et se ferait son porte-parole.

Mais je m'emporte, continua-t-il. Si on ne m'en empêche pas, je peux parler des heures durant de ces sujets. L’Histoire nous apprend beaucoup de choses sur le présent, et sur les erreurs à ne point reproduire. Dolgir n'entendait rien aux bienfaits de relations pacifiées entre les peuples et aux charmes du commerce, soit, mais je ne suis pas Dolgir, loin s'en faut. Vënmher et Ekëstrim ont besoin l'un de l'autre. Les dons de la Terre sont de bien grands trésors mais il serait bien triste de les garder pour soi quand on sait qu'il est possible de les échanger contre les richesses de la surface. Nos marchands l'ont compris mais ce commerce est si informel qu'il ne rapporte pas autant à notre nation que je le souhaiterais. De plus, beaucoup de ces échanges échappent à votre surveillance, du moins en apparence, et vous prive d'un revenu non négligeable. Alors, peut-être en tirez-vous, à titre personnel, des revenus substantiels. Je sais que votre sens des affaires déborde du strict cadre de vos fonctions. Mais vous n'avez aucun intérêt à voir perdurer cet état de fait. Nous pourrions, dans le cadre d'un traité clairement défini, augmenter de façon non négligeable la quantité - et la qualité - des biens échangés et par là même faire gagner à nos pays respectifs beaucoup plus d'argent en taxes et droits de passages divers, sans pour autant avoir à dépouiller nos négociants, qui pourraient agir sans crainte de la loi et cesser de vendre à perte. Il est temps de s'organiser et de définir clairement nos conditions. Peut-être ne sera-t-il pas possible d'obtenir dès maintenant un accord définitif, car il nous faudrait plus de temps, mais nous pourrons esquisser la nature des relations commerciales entre nos deux peuples.

Il n'avait finalement rien proposé de plus que ce qui était déjà sur la table. La venue de l'Intendante même résumait ce qu'il venait de dire. Mais il n'avait nullement envie de débuter les négociations par une proposition claire de sa part. Il préférait attendre que le partenaire s'avance, dévoile ses intentions, de façon à ne pas être pris au dépourvu. Il manquait peut-être d'audace mais il ne doutait pas de parvenir à un résultat à la hauteur de ses espérances. Le Conseil pourrait bien s'écraser devant lui s'il s'en tirait sans son aide. Il n'avait pas besoin de ces vieillards mais ces derniers savaient se montrer horripilants. Et il ne sous-estimait jamais leur pouvoir de nuisance. Elenia Tannïr ? Tout simplement son meilleur espoir de voir réduits au silence ceux qui le bridaient dans sa volonté de réformer la société merisienne.
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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptyMar 1 Mai - 3:27

Elenia commençait à apprécier le personnage qu'était le Patriarche. Malgré ses manières un peu rustres, il n'en demeurait pas franc, éloquent et respectable. Elle l'observait maintenant avec beaucoup moins de méfiance. Elle ne savait pas pourquoi, mais elle sentait que cet homme était quelqu'un de droit et loyal. Quelque chose de rare en Elirondia, enfin surtout à Ekëstrim. Alors dès qu'elle pouvait trouver un allié fidèle, elle n'hésitait pas à le prendre. Et puis il n'y avait que des avantages, comme par exemple agrandir ses relations. C'était une chose très intéressante, surtout quand cet agrandissement accueillait le meneur de toute une race, de tout un royaume. Enfin, ils y trouvaient tous deux leur compte. Lui voulait la paix, elle voulait le pouvoir par l'argent. Tout s'assemblait parfaitement. Elle l'écoutait en silence, comme elle l'avait fait depuis le début. Elle ne put s'empêcher de penser que son interlocuteur adorait les monologues. Si les ondaliens adoraient broder du tissus, lui aimait broder des mots.

Quoiqu'il en soit, il brodait bien. Il rebondissait, faisait des blagues, s'agitait dans ses discours, il se mettait parfaitement bien en scène, et se montrait très convaincant. En tout cas, il avait largement convaincu l'Intendante. Elle ne le quittait jamais des yeux, c'était une habite chez elle de ne jamais détourner le regard, car c'était pour elle un signe de faiblesse. Mais peut-être était-ce simplement un état de méfiance avancé dont elle n'en avait pas conscience. Elle ne pouvait pas se voir dans un miroir, mais elle avait beau faire tous les efforts pour lui montrer son intérêt et sa bienveillance envers lui, elle en demeurait toujours froide, et rien ne voulait sortir, rien ne voulait transparaître. Simplement un sourire, un visage figé. Comme un masque taillé dans la pierre qui ne pouvait plus prendre aucune autre forme, et qu'elle devait changer mécaniquement sans transition, pour faire apparaître un autre masque. Il amena enfin le sujet, celui qui intéressait le plus l'ondalienne : les accords qu'ils allaient faire. Bien qu'elle avait déjà lancé le sujet, il avait trouvé le moyen de le contourner un instant, pour mieux y revenir après. Il reculait pour mieux sauter, en résumé. Alors elle en fit de même, quoi qu'elle ne tourna pas trop autour du pot non plus. Mais elle prit la parole en disant ceci :


Certes vos prédécesseurs ont fait des erreurs, mais qui n'en fait pas ? Maintenant que vous savez ce qu'il ne faut pas faire, maintenant que vous avez tiré des leçons des erreurs des anciens Patriarches, je ne peux pas douter de votre droiture et de votre confiance pour des ententes financières à venir. En effet il faut mettre un terme au marché noir, car ceux-ci ne sont pas bons pour la prospérité et la paix de nos royaumes. C'est un peu comme si nous prenions un bol d'eau. Ne serait-ce qu'une seule fuite, aussi infime soit-elle, peut causer la perte de l'eau. L'économie marche de la même manière qu'un saladier rempli d'eau. Il faut boucher les fuites, et élargir le saladier pour qu'il y est le moins de fuite possible, ou du moins qu'il y ai le moins d'eau qui s'échappe. L'élargissement de ce saladier repose principalement sur les échanges commerciaux entre deux royaumes. Plus il y aura d'eau dans le bol, plus les fuites seront moins importantes. Plus il y aura d'échanges de toute sorte, moins les personnes iront au marché noir. Et tout le monde y trouvera son compte. Ce sont les rouages parfaits de l'économie.

Elle ne voulait pas paraître condescendante en lui enseignant ce qu'était l'économie, non. Elle orientait progressivement la conversation dans le vif du sujet. Il ne fallait pas se précipiter, car sinon le Patriarche croirait qu'il lui était urgent d'avoir des relations commerciales, et il profiterait de la situation pour avoir de meilleurs avantages sur le commerce. Elle observa ses hommes de main un instant, puis revint sur Vuzlin en continuant :

Comme un pont, il faut construire progressivement les fondements. Je propose donc un marché précis pour débuter nos commerces.

Elle se redressa et fit signe enfin à un de ses hommes de main de faire venir le dernier présent, qu'elle avait garder en réserve. Ce présent était une sorte de preuve du talent des ondaliens, et un avant-goût de ce qu'il pourrait recevoir s'il acceptait les accords. Elle le fixa en souriant, et ne détourna les yeux que quand le servant vint s'agenouiller pour présenter le tissus devant le patriarche. C'était un tissus rouge, épais mais doux. Des ornements aux formes régulières dorées avaient été méticuleusement cousus sur toute la surface du tissus. C'était un travail parfait, digne de la réputation des ondaliens. Elenia esquissa un sourire satisfait, et fit :

Vous avez sans doute entendu que c'était à Ekëstrim qu'on trouvait les meilleurs broderies et les meilleurs tissus. Et bien jugez par vous-même par ce dernier présent que je vous fais. Vous avez su sans peine me convaincre de votre talent de joaillier, alors permettez moi de vous montrer directement ce dont mon royaume est capable. Voici donc le marché. Chaque mois nous vous vendrons nos plus somptueux tissus. Si vous le voulez, même si je sais que vous préférez travailler par vous-même, vous pourrez commander n'importe quelle forme de textile, et n'importe quelle matière. Un rideau en soie ? Un tapis en velours ? Une robe ? Une cape ? Tout ce qui relève de la broderie vous sera vendu. Si les mérisiens aiment se pavaner avec leurs pierres précieuses, ils aimeront sans nulle doute montrer le luxe de leurs vêtements. Et alors ils se diront que c'est grâce à vous, le Patriarche Vuzlin Arthrond, qu'ils peuvent porter sur mesure la mode d'Ekëstrim, répandue dans tout Elirondia.

Elle fit une pause pour observer sa réaction, puis reprit :

Mais je ne vais pas m'arrêter à ce simple commerce. Je n'ai pas eu le temps de me renseigner sur la qualité de votre médecine. Mais nous avons une plante dans nos eaux profondes, qui s'appellent le timyr. C'est une plante dangereuse si on ne sait pas comment en extraire l'huile, qui elle au contraire est extrêmement gratifiante, puisqu'elle soigne des maladies courantes d'Elirondia, certains poisons et aide même à la cicatrisation. Vous seriez vu comme un sauveur en apportant des remèdes sophistiqués à votre peuple, contre les maladies et les plaies qui peuvent parfois s'aggraver. Il n'y a rien de plus pratique que le timyr.

En échange de tout cela, vous nous offririez votre forge, la plus efficace qu'il soit en Elirondia, personne n'ayant prouvé le contraire jusqu'à maintenant. Vous vous commanderions des équipements, des épées en majorité, ainsi que des boucliers et des armures. L'armée des ondaliens porteront vos armes. De plus, nous vous donnons la chance de vous occuper à ce que vous savez faire de mieux, tout en faisant propageant la réputation de votre talent sur les champs de bataille.

Tout au long de son discours, Elenia était restée déterminée, et très sérieuse dans tout ce qu'elle disait. Elle avait bien l'intention de lui faire accepter son offre, et elle espérait que sa seule offre plairait au patriarche, car elle n'avait pas pour habitude de revenir sur ses propositions. Elle n'avait laissé aucun débouché, aucune issue à son interlocuteur pour qu'il propose un autre marché. Elle n'avait pas non plus commencé à parler du prix des exportations et des importations. En résumé, la partie ne faisait que commencer.
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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptyMar 1 Mai - 16:09

Vuzlin avait attentivement écouté. L'Intendante ne faisait décidément pas défaut à sa réputation de redoutable négociante. Il s'en serait bien entendu douté mais il était à présent certain qu'Elenia s'était renseigné en substance sur la nature des biens produits et exportés par son peuple. Et puis, elle n'avait pas manqué l'occasion de lui montrer par ses paroles qu'elle était compétente, qu'elle maîtrisait elle aussi son sujet en profondeur. Tous deux avaient leur fierté, et il ne pouvait le reprocher à l'Ondalienne. Cependant, il ne s'y trompait pas. Elle ne cherchait pas à lui en imposer, pas plus qu'il n'avait essayé de le faire. Il avait senti qu'il l'avait agréablement surprise et, toute retorse qu'elle put être, il savait qu'elle ne lui causerait pas d'autres soucis que ceux d'une exigeante négociation commerciale. Mais auraient-ils besoin d'en aller jusque-là ? Pour la forme, certainement. Mais au fond, ils savaient tous deux que ce manège ne faisait que dissimuler un accord qui s'était écrit dans leurs esprits au fur et à mesure qu'ils s'étaient jaugés l'un l'autre. Les mots ne feraient que donner leur consistance aux idées, de la façon la plus naturelle qui soit, et leurs deux peuples seraient ensuite plus liés que la veille. Si la négociation se poursuivait au delà du raisonnable, il savait que cela ne tiendrait pas de la nécessité mais bien du jeu, du jeu qui veut qu'aux plus hauts échelons de la hiérarchie tout se doit d'être ritualisé.

Il récapitula mentalement ses propositions, et les trouva une fois de plus d'une redoutable intelligence. Il ne s'agissait pas forcément de biens de première nécessité, non. Cela aurait pu donner l'impression qu'Ekëstrim tentait de placer Vënmher dans une dépendance alimentaire. Il s'agissait plutôt de marchandises capables d'améliorer un peu plus l'ordinaire des Merisiens dont il serait peut-être dur de se séparer en cas de rupture des relations commerciales mais sûrement pas impossible. Les tissus, par exemple, augmenteraient sa popularité. Si Vuzlin réprouvait plutôt le luxe, au grand dam de ses conseillers, qui ne cessaient de lui répéter qu'il devait afficher sa supériorité de façon visuelle par un étalage toujours plus grand de richesses, il en comprenait l'attrait. Et puis, les Merisiens aimaient la profusion et parfois même la démesure. Peut-être était-ce un moyen de trouver quelque réconfort face à une société si désespérément terre-à-terre et verrouillée, il l'ignorait. Toujours est-il que Vënmher ne disposait pas des ressources nécessaires pour soutenir une industrie textile digne de ce nom. Les quelques merciers et tailleurs de ce pays avaient pour principaux clients les habitants de la Ville Haute, les individus des castes dites supérieures. Il était toujours difficile pour les plus pauvres de trouver de quoi s'habiller décemment, même si le marché noir aidait beaucoup de gens à trouver de quoi se vêtir à bas prix, ce qui ramenait directement au sujet de leur rencontre. Les étoffes des Ondaliens permettraient d'améliorer la situation, les meilleures d'entre elles contentant la haute société, permettant aux riches Merisiens de se pavaner et d'exhiber leurs épouses dans de splendides tenues. Et les autres, moins raffinées, pourraient être vendues en gros, alimentant un nouveau commerce, qui augmenterait la richesse de la nation. Un cercle vertueux en somme. La proposition n'était pas anodine, en somme, du moins pas lorsqu'on commerçait avec un royaume souterrain qui ne pouvait élever ou faire pousser n'importe quoi.

Quant au timyr, il se rappela en avoir lu une description dans l'un des lourds ouvrages de botanique qu'il avait compulsé avant de se présenter à la désignation du nouveau Patriarche, lorsqu'il n'était encore qu'un jeune Merisien prometteur. Cette plante était vantée par de nombreuses légendes des peuples de la surface et quelques contes merisiens, plus rares ceux-ci. On racontait qu'Aril Doreïal, un général ondalien avait sauvé l'Eradrin Drilvan Aukan, dont il était secrètement amoureux, du venin d'une vile créature aquatique en employant ce remède miraculeux. Depuis, la fière combattante du feu l'avait accompagné dans chacune de ses batailles et ils avaient fini par convoler en justes noces. Vuzlin aimait cette histoire, bien qu'elle fut sans doute brodée par rapport à la réalité historique qui remontait dans ce cas à bien des centaines de cycles. Elle lui rappelait que les différences entre les peuples pouvaient bien s'effacer lorsqu'une vie était en jeu, à l'heure des batailles et en amour. Une leçon importante puisqu'en ce jour il avait devant lui une Ondalienne et, qui plus est, l'Intendante d'Ekëstrim, en pleine cathédrale d'émeraude. Et elle lui proposait du timyr. La boucle était bouclée en quelque sorte. Le sort semblait prendre plaisir à lui faire appréhender l'étroitesse de ce monde dans lequel tout est lié. En tout cas, il était avantageux pour son peuple d'importer une telle chose. Sous terre, les meilleurs remèdes étaient les champignons mais la plupart voyaient leur ingestion sanctionnée par une succession d'hallucinations et de délires d'un réalisme terrifiant. D'autres remèdes atténuaient les effets psychoactifs des solutions fongiques mais ils en atténuaient la puissance. Le timyr était une médecine bien plus douce, sans effets secondaires dangereux dans le cadre d'un usage modéré, et elle était très polyvalente. Toutefois, Vuzlin voyait déjà ce que cachait cette proposition. Le timyr n'était pas qu'un don de la nature pour aider à la guérison, il entrait également dans la composition des potions les plus puissantes d'Elirondia. Il fallait un savoir alchimique astronomique pour pouvoir l'utiliser dans cette optique. Ainsi, en lui proposant simplement cette plante, Elenia préparait-elle la voie pour un commerce plus large encore - et bien plus juteux. Astucieux. Il allait devoir se préparer à mettre autre chose dans la balance si elle comptait lui vendre des services d'alchimie. Les experts n'étaient pas réputés pour être sous-payés.

Et bien, Dame Tannïr, vos offres me semblent raisonnables. Vos étoffes seront correctement employées, soyez-en sûre. Quant au timyr, j'en avais entendu parler, et j'en connaissais les vertus curatives. Une plante également très utile lorsque l'on veut faire de l'alchimie à un niveau d'excellence. A présent, parlons de ce que vous vous proposez d'exiger en retour. Je serai heureux de fournir à Ekëstrim les produits de nos forges. Cependant, il me semble dommageable que notre accord se limite aux seuls armes et protections quand nous avons tant à offrir. Nos joaillers font tant de belles choses que nous nous ferions un plaisir de vous proposer. Bien entendu, il n'est pas question d'inonder vos marchés de nos joyaux et de nos pierres précieuses, sous peine de voir votre or perdre de sa valeur, ce qui serait mauvais et pour vous et pour nous. Mais il serait intéressant de ménager une place pour un commerce ciblé, à destination principale de vos riches compatriotes. Et puis, vous comprendrez que nous ne pouvons nous permettre de fournir toutes vos troupes de nos armes, sous peine qu'on nous prête des intentions que nous n'avons jamais eu. Qui sait ? Les autres peuples ne peuvent-ils pas penser que nous avons signé une alliance militaire dans l'intention peu avouable de les écraser ? Cela étant, notre accord est libre d'évoluer et si une guerre éclate et que nous jugeons que vous n'outrepassez pas votre bon droit, nous nous ferons un plaisir d'équiper l'intégralité vos soldats. Une simple clause suffira. Cela étant, je ne tiens pas à prendre dès maintenant le risque de passer avec vous un accord d'exclusivité sur l'équipement de vos guerriers. Il est donc normal que je vous propose une contrepartie. Nos bijoux ne remplaceront jamais une lame affûtée, nous en sommes conscients, mais ils devraient pallier le manque à gagner pour votre pays et le mien. "Vënmher souhaite la paix", souvenez-vous. Et il est des objets dont l'utilité première fait que nous ne pouvons les vendre sans crainte de les voir mal employés, quand bien même une exportation sans limites pourraient nous enrichir. Il faut parfois au dirigeant voir plus loin que ce qu'il a devant les yeux, vous mieux que personne devez le comprendre.

Il avait dit cela posément, sans agressivité. La vente d'armes avait effectivement des conséquences. Quelque chose dans son vécu proche lui permettait de penser qu'il devrait bientôt songer aux alliances militaires et se faire plus que jamais marchand d'armes mais ce moment n'était pas encore venu. Il n'avait pas envie d'encourager les ardeurs guerrières que pourraient avoir la Souveraine si elle se piquait d'attaquer ses voisins. Bien sûr, il doutait que cela arrive un jour, connaissant sa réputation, mais la prudence primait.
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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptyMar 1 Mai - 22:15

Ça y était. Ils étaient en plein dedans. Toute cette impatience accumulée pendant le trajet et le début de leur rencontre s'évacuait dans ce débat qui s'annonçait tumultueux. Il semblait que la femme aimable et enjouée avait disparu. Elenia n'existait plus, il n'y avait que l'Intendante, intransigeante et astucieuse. Elle semblait extrêmement sûre d'elle, peut-être était-ce dû à son orgueil, qui lui-même était dû à son métier haut placé. C'était un cercle vicieux. Mais elle se complaisait dans ce cycle sans fin. Elle aimait son travail, et le faisait bien, du moins bien pour elle. Qu'est-ce qui lui faisait penser ça ? Simplement l'accord facile qu'elle venait de conclure sur son commerce. Elle avait tapé en plein dans le mille, et c'était une victoire qu'elle savourait. Elle posa chacun de ses doigts l'un contre l'autre, en posant sur les accoudoirs du siège : la stature parfaite d'une femme d'affaire avérée. Prête à attaquer, à négocier fermement.

La porte du triomphe se referma bien vite, tandis qu'un obstacle se posa devant cette porte. Le Patriarche était prêt à vendre le talent de ses forgerons, mais la vente serait limitée. Elle baissa les yeux en coin, comme pour réfléchir à cette nouvelle offre. Partout dans Elirondia, les tensions s'accumulaient, et tout le monde savait que les bannis se préparaient actuellement à la guerre. Il fallait faire vite. Mais d'un autre côté, le Roi n'était qu'un vieux croûton sénile qu'il serait facile d'écraser, même sans les armes des mérisiens. Peut-être en effet avait-elle eu les yeux plus gros que le ventre. Elle pensa bon de commencer d'abord par renforcer la défense de la cité des eaux en armant les miliciens, ensuite elle verrait pour élargir à l'armée toute entière, quand le moment sera venu, et que les relations entre les deux royaumes seraient plus solides. Elle revint donc rapidement sur ce qu'elle venait de dire en répliquant :


C'est une cause noble que de vouloir la paix, mais parfois nous n'avons pas d'autres choix que de se battre, pour justement défendre et faire revenir cette paix tant convoitée. Et moins le combat durera longtemps, plus la paix reviendra vite. Néanmoins je comprends vos craintes, et vous ne faites que prouvez votre droiture et votre conviction. Ainsi, les commandes ne viseront qu'à renouveler les armements de toute la milice d'Ekëstrim, ainsi que leurs armes de stock qui commencent à se faire vieilles, selon les rapports du chef de la milice de la cité des eaux. Si nous ne pouvons pas attaquer, sachons au moins nous défendre décemment.

Elle esquissa un sourire aimable à son interlocuteur. Au fond, elle ne voyait pas cette décision comme un compromis, car l'accord allait toujours dans son sens. En effet, elle avait repensé en même temps à l'accord secret qu'elle avait fait avec le chef de la milice il y a quelques semaines auparavant. Comme celui-ci était chargé personnellement de veiller à la sécurité de l'Intendante, elle se dit qu'elle pourrait en même temps lui montrer ce qu'elle était capable aussi de faire pour lui. Une sorte de stratège pour lui montrer à la fois son pouvoir, ainsi que la preuve de sa confiance. De belles épées, neuves et tranchantes, rien ne pourrait mieux le convaincre.

Elenia restait encore sceptique, voire même réticente au marché des pierres précieuses. Comme il l'avait si bien évoqué, ce commerce pourrait entraîner la perte de la valeur de la monnaie à Ekëstrim. Cela n'apporterait rien de bon aux affaires d'avoir sur les bras des pierres précieuses à n'en savoir qu'en faire. Peut-être pour se pavaner, pour les plus riches, mais alors ce commerce ne semblait pas assez rentable, et pour l'instant ce qui l'intéressait, c'était de tirer la carte la plus rentable dans ses échanges commerciaux. Il fallait des choses utiles, et les pierres précieuses à montrer n'étaient rien. Ekëstrim avait déjà des opéras, des ballets et des pièces de théâtre à montrer, c'était suffisant. Elle expliqua donc ainsi :

Quant à votre offre sur vos pierres précieuses, je refuse. Je ne remets pas en cause votre...don, si je puis dire, pour la joaillerie, mais comme vous l'avez parfaitement bien souligné, ce commerce causerait la perte des ondaliens. Et je veux être sûre que nos échanges seront rentables pour chacun de nos royaumes. Donc je vous propose de nous vendre votre savoir. Faites venir un mérisien à Ekëstrim, qui enseignera aux ondaliens comment forger les épées les plus tranchantes. Je peux vous assurer que ce mérisien sera remercié très généreusement. Nous payerons son séjour, son gîte et son couvert, et aura beaucoup d'or. Si vous le souhaitez, vous pourrez même faire accompagner ce mérisien par d'autres hommes. Je suis sûre qu'ils aimeront tous découvrir la cité des eaux. Cela ferait l'équilibre entre nos deux commerces. Nous vous vendons nos dons d'alchimie, et vous nous vendez vos dons de forge. De cette manière, tout le monde est content.

Elle ferma sa main à ses derniers mots. Comme pour signaler une proposition irrévocable. Cette fois-ci elle ne reviendrait pas sur ses mots. Elenia était persuadée que l'accord venait d'être conclu, car de toute façon il n'aurait pas d'autres choix, car ce serait sa seule offre. Mais l'entretient entre le Patriarche et l'Intendante était loin d'être terminé. Ils devaient encore parler des prix, des taxes, et aussi des trajets des marchands. Oui, l'ondalienne avait pensé à tout. Et elle espérait bien que tout se déroule comme elle l'aurait prévu.
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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptyJeu 3 Mai - 17:21

Vuzlin avait beau s'attendre à un refus en ce qui concernait la vente des pierres précieuses, il n'en avait pas moins été déçu. S'il ne s'encombrait pas d'objets de luxe, il ne comprendrait jamais cette habitude qu'avaient les gouvernants de préférer les armes aux belles choses. Peut-être étaient-elles plus utiles mais il était persuadé que l'on pouvait éviter d'en arriver aux conflits sanglants par d'habiles négociations. Si tous les souverains du monde pensaient ainsi, sans doute les épées n'auraient-elles pas d'autre utilité que l’apparat. Cela étant, il savait que l'or était une chose importante aux yeux des autres peuples, et qu'il ne serait pas bon d'abaisser sa valeur. Les Merisiens avaient adopté le mode de paiement des peuplades étrangères par commodité lors des échanges. Vënmher regorgeait d'or, un or dont on faisait des bijoux mais qui n'avait aucune utilité en tant que matière première. Il n'est pas possible, hormis par la magie, d'obtenir un outil efficace à partir de l'or, et encore moins une lame. La plus grande utilité qu'on put lui trouver était la menace qu'il faisait peser sur les autres économies, de par son abondance dans les sous-sol d'Elirondia. Daöm Murin, l'un des rares Patriarches issus de la caste des marchands, avait empêché une guerre totale d'éclater entre les quatre races en faisant circuler plus d'or et d'argent en surface que les Eradrins, Ondaliens et Éthérés n'en possédaient. Le risque de voir éclater une crise économique sans précédent avait poussé les dirigeants étrangers à céder à ce chantage et le Patriarche avait fait rapatrier sans tarder ses précieux métaux. Sachant cela, il comprenait les réticences de l'Intendante et ne lui en tenait pas rigueur. Après tout, ce petit contre-temps lui avait permis de proposer une contrepartie plus intéressante pour les Merisiens, et sans doute également pour elle. Les savoirs alchimiques manquaient sous Terre, et étaient bien plus précieux que n'importe quelle bourse remplie de devises. Car s'il y avait bien quelque chose qui flattait l'oreille du Merisien éclairé, c'était bien les mots "échanges de technologie."

Cependant, il savait que jamais les Ondaliens ne pourraient égaler les Merisiens dans la fabrication d'armes et d'outils. Après tout, le peuple sous la terre avait tiré avantage de son don magique naturel pour devenir ce qu'il était aujourd'hui. La magie de la Terre sous-tendait une large part de l'artisanat merisien et elle était la source du savoir-faire de son peuple. Les Ondaliens pouvaient bien tirer parti de la magie de l'eau pour récolter des plantes sous-marines difficiles à extraire mais l'alchimie n'était pas qu'une question d'ingrédients. Il sourit intérieurement. Peut-être l'Intendante se préoccupait-elle d'argent, de rentabilité, et de tous ces soucis, au fond cela ne le dérangeait pas. Vënmher avait moins besoin d'or - en cas d'extrême nécessité, ils disposaient d'une arme économique puissante - que de savoirs et de matières premières. En un sens, leur intérêt étaient parfois divergents mais jamais opposés.

Et bien, Intendante, cet accord me semble bon, conclut-il. Nous vous enverrons sous peu un Maître de la caste des forgerons qui enseignera à vos artisans tout ce qu'ils pourront apprendre de son art. Bien entendu, il sera libre de retourner en sa patrie les jours de fêtes religieuses et pourra emmener avec lui sa femme et ses enfants. Je chargerai dès la fin de cet entretien l'un de mes hommes d'aller quérir un volontaire que vous pourrez entretenir avant votre départ. Libre à lui toutefois d'emmener ou non avec lui des apprentis, je ne saurais l'y contraindre. Et afin que l'accord soit raisonnable, je vous prierais d'ordonner à l'un de vos experts en alchimie, qui jouira des mêmes droits que notre forgeron, de s'installer en Tanadian.

Il se réajusta dans son siège. Tout se passait à merveille. L'Intendante, visiblement désireuse de mener la danse, s'était enhardie et avait ouvert des perspectives plus intéressantes que ce qui avait été implicitement prévu. En reculant sur certains points, en avançant sur d'autres, il avait consciemment cherché à lui donner l'impression qu'il cherchait à dominer le débat. Ce qui n'était évidemment pas le cas. Leurs buts étaient si différents qu'ils n'avaient aucune raison de ne pas tomber d'accords. Peut-être avait-il ainsi réussi à aiguiller sa fierté et à la pousser à plus d'audace. Il n'en jurerait pas. Mais en affaires il connaissait l'importance de ne pas froisser son interlocuteur. Elenia voulait mener la danse ? Grand bien lui en fasse ! Tant que ses propositions étaient raisonnables et apportaient quelque bénéfice au peuple Merisien, il se ferait un plaisir de les avaliser. A présent, il était temps de passer à la partie de la discussion qui lui parlait le moins. La fastidieuse négociation des prix et des taxes de passage. L'or n'était pas une nécessité vitale mais il fallait malgré tout que les Merisiens possèdent suffisamment de monnaie pour rendre possible les échanges avec l'extérieur. Le troc avait lieu couramment sous la terre mais en surface c'était toute autre chose. Et comme il n'était pas souhaitable de vivre en autarcie, il se devait de songer au problème. Il lança donc le signal que l'Ondalienne devait attendre de lui :

A présent que nous avons mis un terme aux négociations en ce qui concerne la nature de nos futurs échanges, il est plus que temps de démarrer la discussion sur la façon dont ils se feront. Quelles quantités devrons-nous exporter, chacun de notre côté, et à quels tarifs ? Quels droits de passage pouvons-nous exiger à nos frontières respectives ? Et aussi, comment voyageront les marchands et qui les défendra sur la route ? Qui devra payer en cas de commande non honorée ? Voilà de quoi nous devons parler maintenant. Je suppose que vous avez en tête toutes les réponses à ces questions et que vous défendrez vos solutions bec et ongles. C'est pourquoi je vais vous laisser commencer puis nous verrons à modifier les termes qui ne me semblent pas respecter l'équité. A vous de jouer, dame Tannïr.
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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptyVen 4 Mai - 23:45

De ses bras elle avait soulevé l'enclume, et l'avait jeté au loin pour ouvrir cette fameuse porte : la porte de la victoire. Elle ne mit pas longtemps à le convaincre. Ce fut rapide et efficace, et Elenia sentait beaucoup de fierté d'avoir réussi aussi facilement à conclure un marché, avoir trouvé un terrain d'entendre intéressant pour les deux royaumes respectifs. Néanmoins, elle ne voulait pas qu'il prenne un volontaire au hasard, mais qu'il envoie quérir le meilleur des forgerons de tout Venhmër. C'est un point qu'elle garda précieusement de côté pour le ressortir au dernier moment, quand le marché sera conclut. Car s'il ne prenait pas le meilleur, alors Elenia ne verrait pas l'intérêt d'envoyer le meilleur alchimiste de Ekëstrim. Ce qui était avantageux pour elle, c'est que malgré les connaissances qu'ils acquerront en alchimie, le timyr restait une spécialité qu'on ne trouvait que dans le fin fond des eaux. Alors ils seraient toujours dépendants d'eux pour exercer les talents qu'ils auront appris. C'était une stratégie plus qu'astucieuse, et l'Intendante se félicitait et s'engorgeait encore de fierté pour son ingéniosité.

Mais cette fierté ne se voyait pourtant pas sur son visage, car seul un petit sourire figé, comme une sculpture éternelle dans une pierre. Un sourire aimable et poli, comme le voulait les bonnes manières. Elle ne voulait pas montrer qu'elle avait gagné, du moins pour elle c'était une victoire, de peur que le Patriarche se rende compte de la situation et des avantages, et ne reviennent sur sa décision. Alors la jeune femme gardait un parfait contrôle d'elle-même, même si on ressentait un peu d'hypocrisie de sa part, à force de voir ce sourire sans joie, comme par réflexe de politesse, et des règles de courtoisie, celles que tant les riches apprennent par cœur pour mieux s'enfoncer un couteau dans le dos. Enfin, Elenia n'avait pas ce genre d'intention pour le Patriarche, car malgré le fait qu'elle apparaissait peut-être hypocrite et froide, elle appréciait véritablement cet homme qui l'avait convaincu, et avait réussi aussi à abolir les préjugés sur son peuple, en le représentant sous un nouveau jour.

Elle sentait qu'une nouvelle ère allait alors commencer. L'autarcie de chaque peuple s'arrêtait peu à peu, et alors ils se rapprochaient timidement. S'il fallait commencer tout doucement les relations commerciales, l'Intendante n'hésiterait quand même pas à faire part de son expérience et de son opinion à la Souveraine, ainsi que le Général. En effet; même si elle ne s'occupait pas des alliances et des opérations militaires, elle savait déjà qu'il fallait compter sur les Mérisiens, et que les Mérisiens comptent sur les Ondaliens. Une alliance entre ces deux peuples les rendrait invincible. Les ondaliens par leur flotte performante, et les mérisiens en étant des guerriers fort avisés. Si elle se permit un moment de rêverie et d'espoir pour l'avenir, elle s'arrêta aussitôt pour revenir à l'entretient. Car à cet instant, ils allaient débattre de choses importantes. Le prix et les taxes, en plein dans le mille du domaine de l'Intendante.

Elle croisa ses doigts, et replaça un pan de sa robe qui la gênait sur son siège. Elle se permit de prendre sa gourde pour boire, car mine de rien le fait de rester loin d'une source d'eau et être sous la terre ne la mettait pas au meilleur de sa forme. Mais en acceptant ce rôle et ces responsabilités, elle s'était préparée à ce genre de mal aise qu'elle rencontrerait pendant ses voyages à l'étranger. Elle reposa sa gourde en s'excusant, puis se redressa pour commencer sur un ton sérieux et toujours aussi déterminé, en soutenant le regard de son interlocuteur :


Et bien, je vais vous laisser décider du nombre de tissus que vous voudrez, si vous voulez des robes, des capes, des pantalons, des tapis, en résumé, tout ce qui concerne la broderie, et il en va de même pour le timyr. Je vous laisse gérer le nombre que vous voudrez, car c'est vous qui êtes le mieux placé pour savoir quels sont les besoins de votre population. Je n'interviendrais que si votre offre me semble démesurée. Pour ce qui est de vos armes et de vos équipements. Je veux cinq mille armes, boucliers et armures pour réarmer la milice d'Ekëstrim, de chaque zone, même les moins développées. Évidemment, une partie de ces armes ne seront que des armes de stock au cas où la cité des eaux serait attaquée. Ce n'est que par pure précaution de défense, et sachez que je connais les rapports précis sur l'état de la milice, grâce au chef de la milice en personne. Les armes compteront donc mille haches et quatre mille épées. Je m'engage à payer cent pièces d'or pour chaque marchandise produite, si les armes sont bien efficaces et de qualité, ce dont je ne doute bien sûr pas.

Je vous laisse fixer le prix des tissus, tant qu'il n'est pas en dessous de cent pièces d'or aussi pour chaque pièce produite. Mais je dois m'arrêter sur le timyr. Étant donné que cette plante est très délicate à cultiver, on prend en compte une garantie dans le prix du baume. Une sorte de bonus pour la prise de risques des travailleurs ondaliens qui vont chercher cette plante. De plus, il ne suffit pas de cueillir la plante, il faut aussi la traiter pour qu'elle ne soit plus néfaste, et en extraire l'huile, et la rendre plus consistante, ce qui demande beaucoup de temps. Peut-être qu'après, quand nous vous aurons parfaitement bien appris l'art d'extraire cette huile, nous vous livrerons directement la plante, et le prix baissera alors. Mais pour l'instant, je suis dans l'obligation d'imposer le prix de deux cent cinquante pièces d'or pour un pot de cinquante grammes, sachant qu'il n'y a pas besoin d'utiliser cinquante grammes de timyr pour soigner une plaie ou autre. J'espère que ce dernier point sera clair, car je ne reviendrai pas sur cette décision, et je n'accepterai aucune autre offre en dessous de deux cents cinquante pièces d'or.

Concernant les taxes, et je vais peut-être vous étonné Patriarche Arthrond, mais je n'en souhaite aucune. Inutile de nous encombrer de frais qui ne feront qu'amoindrir nos bénéfices de chaque côté. Mieux vaut dépenser l'or dans des choses utiles et fiables. Et c'est donc pourquoi je vais placer l'argent des taxes non dépensées dans la sécurité du voyage. En effet, car j'ai pu constater que le voyage d'Ekëstrim à Venhmër est relativement long, et que les routes ne sont pas bien définies pour aller jusqu'à votre royaume. Les petits chemins sont périlleux, car ils favorisent les brigands, les embuscades, ce qui serait peu favorable à nos échanges. C'est pourquoi j'utiliserai cet argent pour construire une route tracée avec des tours de guet jusqu'à notre frontière. Je pourrais même faire construire un pont si l'envie ne vous dit pas de prendre le bateau. Je m'engage aussi à faire raccompagner vos marchands par des miliciens ondaliens jusqu'à chez eux. Ces miliciens seront formés spécialement pour ce genre d'opération. De plus, les miliciens vérifieront à l'entrée des portes d'Ekëstrim que toutes les marchandises sont conformes à notre entente : pour éviter le marché noir. Évidemment, ces engagements ne tiennent que si vous ferez de la même chose de votre côté. Tout doit marcher dans la réciprocité.


Elle s'arrêta enfin alors qu'elle s'était élancée dans un discours interminable, sans jamais laisser la parole au Patriarche. Elle n'avait pas encore mentionné les échanges de talents en soi, car il fallait faire chaque chose en son temps. On convenait d'abord les flux de marchandises, puis après on pouvait discuter des flux humains. En tout cas, elle espérait que le Patriarche soit en général d'accord sur ce qu'elle venait de dire. Elle avait été raisonnable avec lui, et cherchait à montrer qu'elle voulait l'enrichir, car elle n'avait pas oublié les présents qu'il lui avait fait. Elle se sentait comme redevable. Mais ses responsabilités l'obligeaient tout de même à oublier parfois ses sentiments « amicaux » pour faire son devoir. Même si parfois elle avait quelques écarts, en général Elenia Tannïr s'occupait prodigieusement bien du budget. Maintenant, la véritable question de la sécurité était de savoir si les mérisiens seraient capables de sortir de leur sous-terrain pour voyager machinalement d'un royaume à l'autre.
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MessageSujet: Re: Sous la terre, rien ne va plus   Sous la terre, rien ne va plus EmptySam 5 Mai - 11:33

Vuzlin posa son menton sur son poing, comme il le faisait parfois lorsqu'il se prenait à réfléchir - chose qui arrivait souvent, parfois trop à son goût. L'Intendante avait posé ses conditions et il doutait de pouvoir infléchir cette résolution qui l'animait. Une femme à poigne s'il en était. En Vënmher, on comptait encore peu de femmes dans les instances dirigeantes, même si les réformes engagées par les derniers Patriarches commençaient à porter leurs fruits en la matière. La mentalité des Merisiens avait beau rendre la marche progressive vers l'égalité malaisée, on s'y dirigeait toutefois sûrement. Une affaire d'éducation, pensa Vuzlin. Après tout, une femme était une femme, qu'elle soit Merisienne ou Ondalienne. Et Ekëstrim, dont le commandement reposait sur les épaules de la Souveraine, ne se portait pas plus mal qu'une autre nation. Quant à Elenia Tannïr, elle semblait être aussi compétente qu'on pouvait l'être à sa place. Et elle semblait avoir le goût de l'exercice du pouvoir. Le Patriarche sourit intérieurement : finalement, hommes et femmes avaient les mêmes appétits dès lors qu'on parlait des honneurs et de la richesse. Il avait du mal à concevoir pour lui-même qu'on put être poussé par autre chose que l'appel du devoir mais le comprenait fort bien pour les autres. La nature humaine était ainsi faite.

En tout cas, il ne doutait pas que les prix imposés par Elenia fussent raisonnables. On discutait après tout de biens de qualité et il aurait été insultant pour l'un comme pour l'autre que leurs valeurs commerciales aient été sous-estimées. En même temps, cela n'était pas excessif. Il n'avait pas envie de polémiquer sur la tarification des échanges. Vënmher pouvait aisément supporter le poids de ces dépenses. L'ouverture de relations commerciales avec d'autres peuples permettraient de gagner encore plus d'argent et, surtout, ferait exploser le nombre de commandes pour les artisans merisiens. Le plus important n'était pas de dépouiller son partenaire en affaires, ce qui était le meilleur moyen de voir rompus les traités, mais d'obtenir sa confiance. La confiance se traduisait par la fidélisation d'une clientèle toujours plus large, ce qui permettait des recettes plus importantes. Et qui disait recettes plus importantes disaient plus de dépenses autorisées. Et l'argent dépensé le serait intelligemment. Cependant, il ne tenait pas à supprimer les taxes à ses frontières. Non seulement parce qu'elles constituaient un revenu non négligeable mais aussi parce qu'elles permettaient de contrôler les flux de marchandises. Une taxe trop importante sur un certain produit dissuaderait les marchands de le proposer à la vente plutôt qu'un autre dont la taxation serait moindre. Ce qui pouvait être utile pour éviter l'inflation ou la dévaluation de certains produits et orienter les échanges. Les gouvernants ne seraient pas derrière chaque étal, et il préférait pour cette raison ne pas enlever les indispensables garde-fous laissés par ses prédécesseurs.

Vos conditions respectent l'équité qu'on attend d'un échange entre deux peuples qui s'égalent et se respectent, Dame Tannïr, dit-il. Pour ce qui est des prix et de la quantité de tissus et de vêtements que nous souhaitons obtenir de vous, j'ai demandé à la caste des marchands de réaliser une étude des besoins de la population merisienne. Je vous la remettrais, ce qui vous permettra de planifier le nombre de caravanes allant à Vënmher par mois et ce qu'elles transporteront. Vous me proposez sans doute avant tout des tissus de grande qualité, mais je souhaiterais également importer du tissu en gros, nos besoins étant en ce domaine assez importants. Ce tissu serait acheté à un moindre prix, sans doute cinquante pièces d'or la pièce, mais en plus grosse quantité, ce qui permettrait des arrivées d'argent plus régulières et plus rémunératrices que la simple vente des tissus de luxe. De plus, en tant que produit de première nécessité, il serait bien moins taxé, ce qui est plus intéressant pour le marchand. Car non, je ne compte pas supprimer les taxes au frontière. Elles nous ont été données par une longue lignée de Patriarches qui s'y connaissaient sans doute bien plus en l'affaire que moi. Il va sans dire qu'une part de l'argent prélevé sera investi dans la sécurité des convois et la fabrication éventuelle de ponts et de routes. Quant à la protection que vous proposez à ceux de mon peuple, je l'accepte avec joie, du moment qu'elle se borne à ramener les marchands à nos frontières. Nous n'avons que peu de terres en surfaces mais elles sont malgré tout peuplées et il serait mal vu que des étrangers armés y pénètrent. Je ne peux malheureusement vous proposer l'équivalent de cette protection. En revanche, je m'engage à faire porter sur Vënmher l'essentiel du coût de l'aménagement des nouvelles routes. La sécurité passant aussi par-là, je ferais rénover les chemins abandonnés après tant de cycles de rupture entre nos deux peuples. Quant aux contrôles que vous désirez effectuer, cela ne me gêne évidemment pas. Vos frontières vous appartiennent et il est normal que vous veilliez à ce que les caravanes marchandes voyagent en toute légalité. Enfin, pour ce qui est du timyr, deux cents cinquante pièces d'or me semble un coût raisonnable. Vous n'avez pas demandé plus car un prix trop prohibitif rendrait les acheteurs frileux donc je ne surenchérirais pas dans l'espoir de voir nos produits vendus plus chers. Si vous avez d'autres suggestions ou des questions à me poser, je les écouterai avec grand plaisir. Nous parvenons à un accord, je le sens. Et bientôt, nous pourrons boire à la prospérité.

Il ne pensait pas trop s'avancer en disant cela. Sans doute faudrait-il régler quelques détails supplémentaires mais cela ne l'inquiétait pas. A ce stade, peu de risques que l'Ondalienne quitte la table des négociations sans qu'ils aient signé le traité. Elle avait obtenu satisfaction de la quasi-totalité de ses réclamations, pourquoi le ferait-elle ? Peut-être avait-elle eu l'impression d'avoir joué, qu'il lui avait fallu batailler, ce n'était pas son impression. Ils seraient arrivé au même point dans tous les cas. Il avança sa main vers l'une des bouteilles et l'examina, un sourire aux lèvres. Un alcool de qualité, il le voyait bien. Puis il regarda l'Intendante dans les yeux, dans l'attente de sa réponse.
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