Le Kölfrath. Le centre du monde. L'antre du désespoir. Un lieu aussi énigmatique que mystique. Le Seigneur de Guerre de sa Majesté le Roi-Rénégat avait passé beaucoup de temps sur la rive jusqu'à présent et il s'en écoulerait sans doute encore beaucoup. En effet, il fallait être un proche d'Isthrion pour savoir qu'il n'y avait à ses yeux qu'une seule forme de hasard. Le Kölfrath n'en était pas un. Aucun lieu dans tout Thorgal ne pouvait être le fruit d'un artifice inventé. Chaque chose avait forcément son origine, son histoire, son passé. Isthrion se maudissait parfois d'être le descendant du camp des perdants. Il n'y avait aucun émerveillement quant au fait de se rendre par ici. Il était souvent coutume dans les autres contrées de s'arrêter au bord de l'eau pour y admirer son reflet. Regarder son visage dans le Kölfrath était tout bonnement impossible tellement l'eau était opaque.

"Pour ne jamais oublier qui nous sommes."

Cette pensée, cette affirmation était tout simplement la vérité que s'était construit Isthrion au fil des cycles. En fait, il était persuadé que jadis ce lieu fut une merveille d'Elirondia. Seulement, une guerre divine était passée par là. Il ne fallait pas être futé pour le comprendre. Et lorsqu'Isthrion se rendait sur la rive du Lac, ce n'était pas seulement son corps qui bouillonnait de rage. Son cœur et son âme tremblaient. Il ressentait l'appel de détresse du Kölfrath. Mais que pouvait-il donc bien faire ? Il était devenu le Seigneur de Guerre de Thorgal au prix de nombreux sacrifices. C'était probablement la plus belle de ses victoires dans sa vie d'homme. Se tourner vers le passé n'était définitivement pas la solution à adopter. Cependant, il était pure folie de vouloir le négliger. Il fallait en avoir connaissance.

"Mon Roi a ordonné la guerre. Quelle douce ironie. C'est peut-être ma dernière nuit à tes côtés, Lac de Kölfrath. Je ne suis personne pour juger de la sagesse de sa déclaration. Cependant, je ne peux plus supporter de voir mes racines mourir encore un peu plus chaque jour. Il est temps que le soleil se lève à nouveau. En tant qu'homme, c'est la dernière chose que je souhaite encore accomplir."

Personne pour l'entendre. Personne pour le critiquer, affirmer ses mots. Ce n'était rien d'autre qu'une façon de se rassurer, de faire le point sur son état d'esprit. Il n'avait pas le droit de douter de quoi que ce soit maintenant. Un ordre de son Roi devait être exécuté, peu importe son origine.

"Aucune femme. Pas la moindre descendance. Seulement des putains. Mes géniteurs n'en croiraient pas leurs yeux. Est-ce que je serais seulement encore là lors qu’enfin les tambours de guerre ne résonneront plus jamais ?"

Le Seigneur de Guerre décrocha l'artefact autour de son cou. Le dé aux trois couleurs. Trois faces noires, deux blanches et une rouge. Souvent, le noir était synonyme de victoire alors que le blanc s'affiliait plus avec le regret. Quant au rouge, c'était la passivité. L'artefact maudit était le seul hasard en lequel Isthrion avait foi. Après tout, il n'y avait que le hasard qui était potentiellement capable de mettre un homme et un Dieu sur le même pied d'égalité.

"Qu'on me coupe la langue si ce savoir m'est interdit."

Et comme à son habitude, il lança le petit jouet. Ses yeux noires devinrent pourpres l'espace d'un instant. La magie opérait et sa réserve naturelle d'énergie se vidait un peu. C'était la condition, le sacrifice. Le dé roulait devant lui et sa trajectoire n'avait rien de normal. Il jouait littéralement, se décalant un instant sur la droite puis l'autre sur la gauche. Enfin le dé sembla s'arrêter sur la face blanche et un frisson de terreur l'atteignit alors. Sa langue ? Il lança un regard méfiant dans les environs. Il se préparait à ce qu'une horreur du passé surgisse du lac. Mais finalement, ce fut la face rouge. La passivité.

"Tu ne connais donc pas la réponse à cette question, Père ? Je t'aurais pensé plus savant."

Le Seigneur de Guerre raccrocha son arme, oui, il en était une, à son cou et lança un dernier regard méprisant vers le ciel. Un regard inutile, les cieux avaient abandonné depuis bien longtemps son peuple. En vérité, il ne pouvait compter que sur lui-même et ce qu'il ferait du terrible pouvoir antique entre ses mains. Pas aussi effrayant et radical qu'une invocation du Dévoreur, certes, mais ce dé faisait de lui probablement le Second homme de cette nation. En tout cas, il était trop tard pour rentrer. On disait de plus que la Princesse n'était pas au château ces temps-ci. Sa presque nièce était l'une de ses personnes avec qui il appréciait vraiment de converser. En fait, elle naquit en même temps qu'il fit son serment pour son Roi de père. Isthrion rejoignit ainsi sa tente installée au loin un peu plus tôt dans la journée et la referma après son entrée. Une bien piètre protection contre une menace humanoïde mais elle aurait au moins le mérite de le protéger du froid. Bien qu'au centre d'un désert, l'humidité du lac se faisait ressentir. C'est ainsi qu'une main sur le pommeau de sa fidèle lame, Isthrion trouva le sommeil.


C'était le rêve qui avait changé la vie d'Isthrion. Il y accordait de ce fait une importance capitale. En fait, il n'était pas ignorant au sujet de l'existence du monde des esprits. Il avait également entendu parler de la demeure des Dieux. Il était alors devenu difficile pour lui de croire qu'un rêve ne représentait pas une partie de la réalité, de sa réalité peut-être. La plupart du temps, ces derniers étaient agités. De ce fait il dormait de moins en moins mais pour lui la nuit était au moins aussi passionnante que le jour. D'ailleurs, l'heure du rêve était venue. Il s'était suffisamment endormi pour cela. Son esprit semblait quitter son enveloppe corporelle et les rayons du soleil perçaient timidement le tissu de la tente dans lequel le corps se reposait. Isthrion observait le moindre détail de ses yeux comme à son habitude. Il ouvrit donc cette dernière et le premier son qui atteignit ses oreilles fut le chant des oiseaux. En effet, Le Kölfrath avait totalement changé d'apparence. Il suffisait de s'avancer jusqu'au bord de l'eau pour admirer son état limpide. Le Seigneur de Guerre s'agenouilla devant cette beauté de la nature et aspergea son visage pour se rafraichir. En fait, le Lac était devenu au moins deux fois plus petit. Un pont en marbre blanc reliait la rive à un curieux édifice. Ce dernier avait l'allure d'un Temple. C'était en fait la vision qu'Isthrion se faisait de cet endroit avant le conflit divin qui déchira l'ensemble de Thorgal. Le Lac de Kölfrath était pour lui autrefois un lieu de repos, saint, plongé dans une nature enivrante. C'était à la fois ce qu'il s'était juré de redonner aux siens.

"Un visiteur, venu d'ailleurs ?"

L'émerveillement faisait toujours partie intégrante du visage d'Isthrion. Il rêvait comme éveillé. Ce dernier avait conscience de la situation actuelle mais cela n'avait pas grande importance. Qui pouvait donc bien venir le déranger dans son sanctuaire alors que la vie en pleine journée était déjà suffisamment pénible et cruelle ?

Roxanne marchait depuis des jours... A une cadence extrêmement soutenue. Elle ne ressentait pas la fatigue des chemins, ni même souvent la faim. Il lui arrivait souvent de découper sa journée, en plusieurs journées. C'était en elle, les reste d'un automatisme detraqué plus que l'expression des réelles besoins qu'elle avait . Quelques fois, elle allait s'allonger deux minutes pour la nuit en pleine matinée. Puis elle se levait, s'habillait, mangeait une pomme et reprennait la route. Avant de retourner se coucher une heure plus tard pour se recoucher deux minutes à nouveau, puis se réhabiller , manger quelque chose, (de l'ordre de l'imaginaire ou non d'ailleurs) et reprendre la route à nouveau. Elle pouvait faire cela des dizaines de fois par jours... Pendant plusieurs jours. Ou au contraire, les journées de Roxanne pouvait durer à rallonge!

Il lui arrivait de faire des journées d'une durée de trois jours! Si bien que jamais elle n'allait se reposer, se nourir ou se désaltérer. Menant son corps jusqu'à l'epuisement. Quand Roxanne mit, pour la première fois son pied sur les terres de Thorgal, on ne pouvait que constater l'état délabré de ses vêtements déchirés en de nombreux endroits et les egratignures plus ou moins profondes qui sillonnaient son corps. Sans parler de sa maigreur extrême et de son visage autres fois enjôleur, maintenant devenu des plus blaffard et des plus inquiétant. Mais ce qui dérangeait le plus dans ce tableau, c'était ce sourire enjoué qui contrasté avec son état de santé et son regard d'une pâleur extrême. Ses yeux d'éthérés, oscillant entre le bleu et le gris pouvait même tirer vers le blanc selon la quantité de magie qu'elle utilisait dans ses rêves.

Contrairement aux apparences, Roxanne n'était pas seule... dans sa tête! Elle vagabondait dans un monde féérique, vêtue d'une magnifique robe blanche. Lieu ou les animeaux et les arbres parlaient et lui tennaient compagnie! En général, plus son corps était à rude epreuve, moins ses rêves devenaient cohérents. Si son corps tombait souvent, faute de s'être rendu compte des irrégularités de terrain ou si ses vêtements et sa chaire se faisait arracher par les forêts mal entretenu de Thorgal... La jeune femme percevait simplement des picotements et son esprit, tel un bouclier, la protegeait de la douleur et par magie, elle pouvait se remettre à marcher. Si vous vous demandez qu'elle est la destination finale de Roxanne??? Sachez que je me le demande aussi. Quoiqu'il en soit, a raison de 80 km par 24heures, Roxanne ne tarda pas à se retrouver bien vite aux abords du lac incontournable de Kölfrath...

Si les paysages de Thorgal étaient désolés... Plus semblables à des ruines ensevelies sous une masse de boue épaisse qu'à un havre de paix... Roxanne percevait les environs tout à fait différement. Comme si sa vision à elle était dôtée d'un calque utopiste. Tout ce qu'elle regardait devenait beau. Tout aurait pût être parfait. Thorgal ce meilleur des mondes! Si seulement elle n'avait pas perçu le désarroi d'un individu. Super princesse Roxanne! Cette protectrice de la veuve et l'orphelin, chercha immédiatement d'ou cette tristesse pouvait venir. Elle était si forte, si déchirante pour son auteur, que Roxanne pouvait percevoir les sensations de trés loin. Attiré par les funestes pensées, Roxanne n'ecouta que son bon coeur et etendit son esprit pour tenter d'offrir un apaisement tout en avançant en direction de la personne qui criait si fort dans son âme sa douleur.

Son esprit tâta mollement les barrières mentales du banni. Ne cherchant pas particulièrement à ce que sa présence soit remarquée. Non... ce qu'elle voulait c'était juste l'apaiser. Elle n'eu pas lontemps à chercher. Elle decela chez l'individu sa fatigue. C'était justement ce qu'il fallait pour lui permettre d'intervenir plus confortablement sur lui sans risquer de se voir chasser de son esprit. Elle attrappa la sensation de fatigue et s'appliqua à en alourdir les effets. Ce qui lui provoqua un vertige. Son corps a elle si epuisé ne pouvait réagir que positivement à cette manipulation psychique là. Elle se sentit somnoler tandis que le banni rentrait se coucher dans sa tente de son côté. L'éthérée se réveilla quelques minutes plus tard, son corps s'étant reposé. Puis guidée par ses songes, sans même sans rendre compte. Ses pas la traînèrent jusque devant la tente du banni

Elle sonda à nouveau l'esprit du banni. Cette fois il semblait endormi. Alors, elle attrappa un des pans de la tente sans chercher à comprendre ce qui avait dicté ce geste et se glissa à l'intérieur. Puis elle s'asseya en tailleur aux côtés de l'endormi. Soudain, elle sentit l'influence d'une magie inconnue tenter de rentrer dans son esprit. Lui provoquant même quelques flashs. Elle vit succéssivement l'image d'un homme dessiné en noir et blanc et des dés. Mais aussi... une bête??? Le corps de Roxanne déjà bien eprouvé se mit à sanglotter sous la violence des flashs. La jeune femme, surprise et paniquée voulu repousser l'intrusion tout aussi fermement et ejecta une décharge electrique à pleine puissance en direction de la magie noire avant que son corps ne s'evanouisse aprés une telle décharge d'énergie!

Roxanne était entrée dans la tente. Savait-elle seulement ce qu'elle était en train de faire ? Il n'y avait rien d'autre que le souffle d'Isthrion pour émettre des sons dans l'atmosphère calme et silencieux. Tant de chemin pour apaiser l'esprit d'un Banni. Quelle héroïque Princesse faisait-elle là. Cependant, et jamais elle n'aurait pu le deviner même en connaître son existence à moins de posséder une certaine culture sur les origines des Bannis... Non, la probabilité était vraiment trop faible. Isthrion était bel et bien le seul être dans cette tente. Le seul être à sommeiller. Il demeurait tout de même l'Immortel. Et quelle surprise ce dû être pour la jeune femme lorsqu'elle tenta de faire le premier pas dans la tente. En effet, l'artefact maudit accroché autour du cou d'Isthrion vibra soudainement et une sombre voix retentit. Et si seulement elle avait su, elle aurait pu se sentir honorée. C'était bien la première fois depuis qu'Isthrion en avait fait l'acquisition qu'il permettait à une mortelle de l'écouter, de l'entendre.

"Une fille d'Athaël ? Vraiment ? Quelle douce attention. Ton propre Père te vendrait-il en te permettant de venir jusqu'ici ? Pauvre sotte. Je suis cependant curieux. Dans un tel état, tu as du faire un sacré chemin. Pour... Apaiser l'âme de cet homme ? Je ne suis pas certain que s'il avait eu une femme dans sa vie, elle aurait pu en faire autant que toi. Mais trêves de bavardages... Jouons !"

Esilhil avait prit la décision de prendre part à cette petite rencontre. De toutes les races du monde, même en comptant les créatures les plus laides et inutiles, c'était bien contre les Éthérés qu'il avait une dent. Alors que Roxanne s'évertuait à faire de la nuit d'Isthrion la plus douce et reposante nuit depuis sa plus tendre enfance, l'Immortel avait fait le choix de s'amuser. Il attaque de plein fouet l'esprit de Roxanne une première fois.

"Est-ce que tu vois l'Aigle qui tombe du Ciel ? Il vous abandonne. C'est sa véritable nature. Il oublie ses propres amis, alors comment pourrait-il bénir de braves gens qui l'immortalisent sans réel sentiment affectif ?"

Une autre vision.

"Observe maintenant Isthrion. L'homme pour lequel tu es venu jusqu'ici. Tu vois son visage ? Il souffre. Crois-tu que tu pourras t'en aller demain ? Une idiote ne peut pas changer le passé. La désolation reste la désolation. Au réveil, Isthrion sera souffrant. Il se rendra compte qu'une femme venue d'une autre contrée à percé sa tente. Plus jamais il ne viendra rêver ici. Jamais plus il ne verra le Temple du Kölfrath. Existe-t-il seulement ? Tu n'en sais rien en réalité. Tu penses juste que cela lui ferait plaisir. En vérité, tu es cruelle de lui mentir."

Encore une autre vision.

"Regarde toujours l'être pour lequel tu as souffert. Dans quelques mois, il viendra anéantir ton peuple. Tu seras probablement sur son passage et là, il t'aura oublié. Tu vois son armée qui s'avance vers ce que tu chéris probablement ? Tu n'as pas besoin d'avoir peur. Je suis un être clément. Je lui rappellerais qu'il te doit sa bonne forme. Peut-être alors feras-tu une bonne esclave. C'est toujours mieux que la mort ? Tu vois son épée qui te coupe la gorge ?"

Il était apparemment aller trop loin en simulant la mort de l’Éthérée. Prise de panique, elle libéra une décharge électrique en direction du dé accroché autour de son cou. En fait, c'était le corps d'Isthrion tout entier qui fut secoué. La chaine en fer qui maintenait le dé en dessous de sa tête fondit et ce dernier tomba au sol. Elle venait par cet artifice de mettre son ennemi hors jeu, pour le moment.


Le rêve quant à lui se poursuivait. Ce qui se passait dans la réalité n'avait pas d'importance. La décharge envoyée précédemment par Roxanne ne l'avait pas tué. Cependant il ne se réveillerait pas maintenant. Isthrion était toujours aux abords de ce magnifique Lac, au milieu de cet espace vert à en faire rêver plus d'un. Le mystérieux Temple se dressait toujours face à lui. Une jeune femme s'était approchée. Il ne s'agissait pas de Roxanne. C'était une personne totalement inventée sous l'impulsion du pouvoir de Roxanne. La nouvelle protagoniste vint s'asseoir à ses côtés pour lui prendre doucereusement la main et lui sourire.

"Tu n'as pas toujours besoin de te sacrifier, tu sais. Tu restes malgré tout un fils perdu. Je sais que dans le fond, tu n'es jamais parvenu à te pardonner pour ce qui est arrivé à tes parents. L'Immortel sera ta perte si tu ne fais rien. Il est plus cupide que toi. Il pourrait parvenir à briser le semblant d'innocence qui reste encore en toi. Cette parcelle d'Humanité qui te permet de ne pas croire à tout ces mensonges. Quelle Père promettrait à son enfant une Armée Immortelle alors qu'il ne peut même pas se lever sur deux jambes pour se promener ici avec toi ?"

"Je voulais seulement être libre. Je ne supporte pas la vue des chaines. Je préfère mourir plutôt que d'être enfermé dans une cellule. Ce qui est arrivé demeurera toujours un accident. Je ne ferais jamais de fils. Diagrin s'éteindra en même temps que moi. C'est un bien bel endroit. Je me sens... comme soulagé. Je suis certain dorénavant que mon combat n'est pas destiné à être vain. Mais qui es-tu ?"

"Qui je suis ? Je me le demande. On m'a demandé de venir jusqu'à toi pour te parler. Tu ne parles jamais. Tu gardes toujours tout pour toi. Et voilà que tu confies à une inconnue que tu ne regrettes rien quant à tout les sacrifices que tu as vécu jusqu'à présent ? Des innocents sont morts."

"Et ceux qui ne sont pas innocents meurent aussi. C'est la Justice. Les innocents meurent toujours de toute façon. Il serait fou de proclamer devant tout un peuple que le Dieu en qui ils tirent leur magie, le pouvoir qui leur permet de survivre et d'avancer un peu est en grande partie la cause de nos soucis. Je ne crois pas au Dieu Fou. Nos ancêtres l'ont suffisamment payés... Il faut évoluer. Mais en même temps, nous avons besoin de ce pouvoir pour tenir tête à ceux qui nous méprisent, nous rejettent. Elirondia est vraiment compliqué."

La jeune femme, à la chevelure d'or, précisons le, ne répondit pas. Elle se contenta de sourire comme si son rôle avait été joué, comme si elle pouvait maintenant disparaître. Elle avait écouté les aveux, les convictions de l'être qui lui était étranger. En fait, elle disparut sans prévenir et à sa place prenait la forme d'une porte en bois avec une simple poignet. Il s'agissait de la liaison entre l'esprit d'Isthrion et de Roxanne. Ce rêve prenait vraiment des allures étranges.


Isthrion avait ainsi traversé la porte menant aux songes de Roxanne. Il n'avait encore jamais vue cette dernière. Il ne savait même pas que son corps était allongé sur le sol près du sien dans le monde physique, réel. L'heure de se réveiller n'était pas encore venue. Il ne fallait en tout cas pas douter sur le fait que le corps d'Isthrion était en train de se remettre de la violente décharge électrique. Son organisme était entre la vie et la mort, elle lui avait vraiment porté un coup dangereux. Le Hiérophante semblait reconnaître géographiquement l'endroit. Thorgal était bien loin derrière désormais. La porte magique l'avait mené jusqu'à Altheria. Il n'avait pas froid. En tout cas son corps ne ressentait rien. L'endroit était un massif rocheux enneigé. La brise semblait à peine souffler. Il percevait un peu plus loin deux individus. L'un était un vieil homme, l'autre une jeune femme. Le tout prenait des allures de confrontations.

L'un était appelé le Penseur parmi les Fury, l'autre était la jeune Roxanne. Pas aussi jeune qu'elle ne l'était autrefois, c'était bel et bien son apparence physique actuelle. Les deux individus se renvoyaient des sorts et aucun ne faiblissait vraiment. Isthrion avait beau s'approcher de la scène, c'était comme si on ne l'avait pas remarqué. Finalement, ce fut celle qui se considérait comme une Princesse qui terrassa le Penseur. Il disparut comme par magie et Roxanne s'effondrait lourdement sur le sol. Le Hiérophante courut aussi vite qu'il le put jusqu'à elle et se laissa tomber sur ses deux genoux dans la neige. Roxanne était en piteux état. Ses vêtements étaient déchirés, ses cheveux sales. Elle revêtait la même apparence qu'à son entrée dans le monde réel sur les terres de Thorgal. Cette scène n'avait rien de réel pour Isthrion et il le concevait. C'est peut-être pour cela qu'il l'a pris délicatement dans ses bras et partit à la recherche d'un refuge.

Isthrion découvrit dans l'heure une grotte. C'était presque trop parfait que de tomber dessus ici. De plus, elle était aménagée. Des flambeaux l'éclairaient afin d'en chasser toutes les ombres et une couverture avait été disposée sur le sol. Pourtant il n'y avait personne. La situation semblait étrange et Isthrion s'y prêtait tout de même. Il déposa soigneusement Roxanne sur la couverture et débuta les premiers soins. A la fin, ses vêtements avaient été changés, sa chevelure nettoyée et lissée. L’Éthérée était à nouveau la jeune et belle Princesse comme dans ses rêves.